Ma relation avec Weddadi Ould Môme n’était pas très profonde au point de façon fréquente.
Durant mon adolescence, je suivais ce champion de la course de motos. À l’instar de nombreux jeunes de Nouakchott, j’étais admiratif qu’il eût troqué l’abaya du derviche contre l’uniforme de motocycliste, à contre-courant des diktats sociaux, dans un sport inapproprié pour les gens de bonne famille chez nous.
Weddadi mena sa petite révolution, leurs remontrances ne le firent pas fléchir, ni leurs craintes des dangers du fer et de ses méfaits, car ses bienfaits, eux, valaient le défi et le goût du risque et de l’aventure. C’est ainsi que Weddadi aimait à mettre le pied à l’étrier de ses gros bolides.
Puis, l’occasion se présenta il y a quelques années de connaître une autre dimension de l’homme, que j’étais à mille lieues de deviner chez un jeune féru des sports mécaniques, attentif aux plus petits détails pour ne pas perdre le moindre mile, qui aimait à vérifier freins, accélérateur, bougies…
Je découvris Weddadi l’honnête homme du Bilad Chinguitt, récitant le Noble Coran, les Hadiths, connaissant l’histoire des anciens et des civilisations disparues. Je découvris un derviche qui grandit parmi des initiés. Je ne tardai pas à découvrir, au gré des rencontres, sa bonté, son humour délicieux, son esprit enjoué.
Weddadi n’était pas seulement le célèbre champion des courses régionales, ou le pilote casse-cou qui ne craignait pas la mort… il fut également un digne descendant de ses illustres ancêtres, les Ahlul-Bayt. Il était tout à la fois commentateur des Hadiths, critique, poète, conteur et littéraire.
Il y a un an, je fus évacué à l’Hôpital « Ibn Sina », en une nuit mémorable durant laquelle j’étais sûr d’avoir rendez-vous avec la mort. À mon entrée, Weddadi accompagnait son épouse qui était sous perfusion intraveineuse. Il se mit à me réconforter, me disant qu’il ne fallait pas m’inquiéter tant. Il riait et s’efforçait, malgré l’état de sa femme, de me rassurer et d’atténuer mon effroi, mon angoisse, jusqu’à ce que mon asthme disparût et que ma situation devînt normale.
Il me posait des questions sur les poèmes de certains poètes d’Iguidi et de Le’ghal et nous nous séparâmes sur un large sourire et des accolades. On se perdit de vue, jusqu’à notre rencontre fortuite sur la rue de la « SNDE ». Chacun de nous était dans une voiture. Il leva une main et m’adressa un sourire, je fis de même, mais il ne le vit que dans le rétroviseur.
Comme j’ignorais ce nous réservaient les jours, le secret du destin, je n’essayai point de lui transmettre mes salutations, de lui exprimer mon amour et le bonheur indicible qui m’étreignait lors de nos rencontres, si peu nombreuses à mon goût.
Il faut dire qu’il n’est point aisé de rattraper un intrépide héros, un vaillant champion.
Adieu, Weddadi Ould Mome. Tu vécus bon, noble, généreux, croyant. Tous surent que tu étais innocent, que ton cœur était exempt de haine. Et si, cette fois, ce cœur limpide, d’un blanc immaculé, te trahit cette fois, c’est que la Force Supérieure le contraignit et l’obligea de s’arrêter. Après tout et avant tout, c’est le destin et la mort est vraie. Pour toi, miséricorde et indulgence d’Allah. Qu’Allah te fasse entrer en Son Paradis. Toutes mes condoléances au peuple mauritanien. À Allah, nous appartenons et à Lui nous revenons.
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